Netanyahou et l’absence du Soudan du Sud

Le PM israélien, Benjamin Netanyahou, lors de son interview sur LCI jeudi 30, a brandi une carte géographique, comme à son habitude. Israël, répète-t-il, est noyé dans un océan arabe, pourquoi tant d’hostilité?
Cette carte montre en effet le Sahara occidental en blanc, et donc sans son intégration dans le Royaume du Maroc.
Le PM et la carte surannée
Capture d’écran, le Soudan du Sud aligné sur le petit-doigt de la main gauche
Mais l’on remarque  que la carte figure aussi un Soudan d’avant 2011. Le Soudan du Sud n’existait pas encore!
L’État d’Israël et la République du Soudan du Sud se sont reconnus presque tout de suite. Entre Israël et le Soudan désormais privé de ses anciennes zones méridionales, les relations diplomatiques étaient sur le point d’être nouées, mais la guerre civile soudanaise a remisé ce projet à un avenir meilleur.
Toujours est-il que Benjamin Netanyahou, qui se targue d’être un étudiant de l’histoire, n’a vraiment pas gardé ses cartes à jour. Et que personne du Ministère des Affaires étrangères israélien n’a dû être consulté.

Niger : l’Union européenne met fin à l’EUMPM

Le Conseil de l’Europe a décidé ce lundi de ne pas renouveler la présence de sa mission anti-terroriste au Niger, baptisée EUMPM, après le 30 juin. Cette décision intervient onze mois après le coup d’Etat par la junte militaire, menée par le général de la garde présidentielle, Tchiani, qui a provoqué la chute du président Mohamed Bazoum, qui est aujourd’hui incarcéré au Niger.

Dès le 4 décembre 2023, la junte militaire avait annoncé vouloir mettre fin à la mission avec l’Union européenne.

Mise en place en décembre 2022, cette mission devait former les troupes nigériennes à la lutte anti-terroriste. Voici le communiqué officiel du Conseil de l’Europe :

« The Council today decided to not extend the European Union military partnership mission in Niger (EUMPM) beyond 30 June 2024, in view of the grave current political situation in the country.

The mission was established in December 2022 at the request of the former Nigerien authorities to enhance the ability of the Niger Armed Forces to contain the terrorist threat, protect the population in the country and ensure a safe and secure environment in compliance with human rights law and international humanitarian law. The agreed initial duration was of three years;

On 26 July 2023, a military coup attempted to oust democratically elected President Mohamed Bazoum. Two days after, General Tchiani, chief of the Presidential guard, proclaimed himself President of the Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP).

The EU immediately condemned the coup in the strongest terms, and in October 2023 it created a framework for restrictive measures in view of the situation in Niger to be able to target those who undermine the stability, democracy, rule of law in the country, and constitute a threat to peace and security in the region.

On 4 December 2023, Niger junta announced that it would terminate the agreement establishing the legal basis for the deployment of the EUCAP Sahel Niger mission and the EU Military Partnership Mission in Niger (EUMPM Niger).

On 5 December, the High Representative expressed his regret over such decision.

By letter dated 21 December 2023, the Mission Commander, Lieutenant-General Michiel van der Laan, notified the Council that the EU personnel of EUMPM Niger had been redeployed to Europe.

On 23 April 2024, the Political and Security Committee agreed that EUMPM Niger should not be extended beyond 30 June 2024. »

Rencontre avec Artak Beglaryan, ministre d’Etat du Haut-Karabakh

La République d’Artsakh (le Haut-Karabagh s’appelle Artsakh en Arménien classique) ne veut pas disparaître juridiquement. Certes, fin 2023, alors que l’armée azerbaïdjanaise quadrillait cette entité récemment conquise, les derniers Ministres prononçaient verbalement la mort de la république. Les rédactions et les chancelleries du monde entier furent promptes à relayer cette nouvelle : la République du Haut-Karabagh s’étant auto-dissoute, nul besoin de la ressusciter.

Pourtant, pour Artak Beglaryan ministre d’État de cette république, en déplacement ce 25 avril dernier à Paris, cette autodissolution fut prononcée sous la contrainte le 28 septembre 2023. L’élection est donc nulle. En l’occurrence, l’armée azerbaïdjanaise aurait exigé que les ministres de la république défaite (mais non encore autodissoute) se constituent prisonniers, faute de quoi l’exode des habitants serait interrompu, ce qui était une menace puissante et arbitraire.

PoRtrait d’Artak Beglaryan

Beglaryan, artsakhiote, exerça les fonctions de ministre d’État de l’Artsakh un moment durant le triste interlude entre octobre 2021 et septembre 2023. Après l’invasion définitive le 22 septembre, Beglyaran sut qu’il était sur la liste des personnes recherchées par le pouvoir azerbaïdjanais. Il fut exfiltré recouvert d’une couverture dans le coffre d’une voiture. Une prouesse pour cet homme aveugle. D’autres ministres ont eu moins de chance : Ruben Vartanyan, multimillionnaire arméno-russe, avait assumé de hautes fonctions sous le régime assiégé de 2021-2023. Il a été arrêté par les militaires azerbaïdjanais, et inculpé de terrorisme. Le ministre des Affaires étrangères, David Babayan, politicien vivace et patriote artsakhiote, a subi le même sort. J’ai rencontré toutes ces personnes avant la grande débâcle, et ils n’étaient considérés comme terroristes nulle part.

Concernant Artak BeglaFletcher School of Diplomacy de l’université Tufts à Boston, il se consacre à prêcher la bonne parole pour l’Artsakh en parcourant les capitales pour marteler que la république d’Artsakh n’est pas morte.

Voici les points saillants qu’il nous a livrés :

Selon son gouvernement, on peut obtenir l’indépendance sans passer par le consentement de l’État dominateur (c’est-à-dire la puissance impériale, DD), dont de bons exemples : le Kosovo, et la Bosnie-Herzégovine. Il aime rappeler que l’Azerbaïdjan n’est pas super-puissance.

Pour une paix pérenne dans le Caucase, il préconise justice et équité, sans quoi les coups de force étatiques deviendront courants. Aujourd’hui 150 000 Artsakhiotes ont été chassés, privés de leurs droits collectifs.

La coopération militaire franco-arménienne

Concernant la coopération militaire franco-arménienne, Beglaryan rappelle que les formateurs français sont déjà présents en République d’Arménie proprement dite, dont l’objectif est la défense contre les menaces extérieures.

Aliev : le fossoyeur du Haut-Karabakh

Aliev (Ilham Aliev, président de la République d’Azerbaïdjan) souvent secondé par ses collaborateurs importants, évoque régulièrement une possible attaque sur diverses régions arméniennes, et parfois menacent d’anéantir la République d’Arménie elle-même, et à Bakou, on déteste cette coopération franco-arménienne.

Déclaration récente gouvernement de l’Azerbaïdjan : le peuplement du Haut-Karabagh va commencer, c’est-à-dire l’expropriation des biens laissés.

Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que l’expulsion des Arméniens du Haut-Karabagh ne doit pas être vue comme une fin de l’histoire, car la finalité est le retour dans leur terre natale de ces populations.

Il rappelle les points suivants : le 4 octobre 2023, 50 Arméniens au Haut-Karabagh, 100 000 partent (il y avait 150 000 habitants, dont à peine 12 Azéris, il y a 10 ans, DD). Aujourd’hui 11 ou 12 Arméniens restent, certains en cachette. Ces 12 ne peuvent bouger librement dans Stepanakert.

Question DD : les États étrangers font-ils assez pour défendre les droits culturels du Haut-Karabagh ?

Artak Beglaryan : non, il n’y a pas assez de volonté, or il y a 2 décisions de la CIJ qui donnent une base à une action diplomatique. Toujours est-il que des monastères et des églises ont été soit rasées, soit réappropriés. J’en veux pour preuve une vidéo avec la déclaration publique d’Aliev en février 2022, où il visite une église arménienne du 13e siècle, et dit devant la caméra qu’il fallait effacer les inscriptions en arménien, au motif que c’est une église « albanaise » dont les Azerbaïdjanais sont les descendants (les Albanais dont il parle, ancien peuple caucasien, n’ont rien à voir avec l’Albanie balkanique actuelle, il ne s’agit que d’une coïncidence de nom).

Autre preuve : les images satellites, un village près Shushi, Karintak, totalement rasée maisons, dispensaire, école. Aliev annonce la construction Mosquée. (DD n’a pas vérifier ces éléments).  Aucune réaction de la communauté internationale.

La guerre en Ukraine : un facteur d’aggravation pour le Haut-Karabakh

Un dernier mot de géopolitique, du point de vue du ministre Beglaryan : depuis 2021, la confrontation entre la Russie et l’Occident affecte la situation.

Avant 2020, le Groupe de Minsk était un rare exemple de coopération entre Russie, les États-Unis et la France. Aujourd’hui on assiste à un affaiblissement de la Russie dans le Caucase Sud. C’est l’Occident qui engendre cet affaiblissement, mais reste passif face à ses effets. La Russie elle-même glisse sous une certaine influence turque et azerbaïdjanaise.

Enfin, Anne Hidalgo va boycotter la COP29 qui se tiendra à Baku, une annonce qu’elle a faite aux côtés d’Artak Beglaryan, devant la statue de Comitas dédiée au Génocide de 1915, place du Canada.

La Biélorussie : une menace pour l’Europe

A l’occasion d’une conférence organisée par le European Council On Foreign Relations, à l’ambassade de Lituanie, des membres de l’opposition biélorusse à l’étranger ont rappelé le rôle central et déstabilisateur du régime biélorusse en Europe. Décalage diplo était présent.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Biélorussie, voisine de la Russie, de l’Ukraine, de la Pologne et de la Lituanie, est la base arrière des troupes russes. Médicaments, armes, camps d’entraînement au début de la guerre, la Biélorussie a représenté un élément clé dans les premiers mois de la guerre en Ukraine.

Le président biélorusse, Alexandre Lukachenko, sous forte influence de Vladimir Poutine, a fait preuve d’une docilité sans faille au début du conflit, du moins jusqu’en octobre 2022, date à laquelle les Russes ont tiré leur dernier missile sur l’Ukraine.

Depuis cette date, il souhaite une implication moindre dans les affaires russes, mais continue à collaborer, sans en avoir vraiment le choix. Lukachenko est installé depuis 1994 et tient le pays d’une main de fer. Il a d’ailleurs annoncé fin avril, à l’occasion du All-Belarussian People’s Assembly (ABPA), qu’il tiendrait des élections d’ici à 2025, si le peuple le demandait.

Une opposition persécutée

Lukachenko est toujours bien accroché au pouvoir et permet à Vladimir Poutine de maintenir son influence en Europe centrale. Une opposition minoritaire et persécutée tente toutefois de contester sa domination depuis l’étranger.

Son principal leader s’appelle Sviatlana Tsikhanouskaya, réfugiée hors de Biélorussie et dont le mari, le youtubeur et activiste pro-démocratie, Sergueï Tikhanovski, est en prison en Biélorussie depuis 2020, pour avoir annoncé son intention de se présenter aux élections présidentielles biélorusses.

Dans une vidéo de cinq minutes, diffusée au début de la conférence,  elle a dénoncé la dureté du régime en place et la difficulté croissante pour les Biélorusses à l’étranger d’obtenir des papiers, qui à l’heure actuelle ne peuvent être délivrés qu’en Biélorussie et non-pas dans un consulat ou une ambassade. L’opposition appelle urgemment la Communauté internationale à agir. Certains de ses membres accusent d’ailleurs cette dernière de ne pas prendre sérieusement la menace biélorusse.

Une question biélorusse mal comprise

L’ambassadeur de la Lituanie à l’UE, Arnoldas Pranckevicus a souligné le manque de stratégie des Etats européens face à la menace biélorusse. « Trop longtemps, la Biélorussie a été considérée comme un problème régional et non pas européen.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’on commence à réaliser que cette approche était erronée » a souligné Arnoldas Pranckevicus. Il a rappelé les principales actions menées aujourd’hui par la Lituanie pour diminuer l’influence biélorusse : le blocage de l’entrée de produits biélorusses, souvent issus de Russie, à la frontière lituanienne.

Une fois les biens entrés en Lituanie, ils sont dans le marché commun de l’UE et peuvent ainsi circuler d’un Etat à l’autre sans aucun contrôle. Depuis le début de la guerre en Ukraine l’on estime que 130 millions d’euros de marchandises auraient transité par la frontière lituanienne vers la Russie.

Mais les chiffres dans le sens inverse donnent le vertige. Selon les données de la Commission européenne, en 2022, c’est presque 1.2 milliard d’euros de biens, en particulier des céréales et des hydrocarbures, qui sont ont traversé les frontières des Etats baltes de Russie ou de Biélorussie. Preuve, s’il en est, que les sanctions de l’UE contre la Russie ont échoué jusqu’à aujourd’hui.

Faire tomber le régime biélorusse

C’est sans surprises l’appel des représentants de l’opposition biélorusse, dont une des voix éminentes est Vytis Jurkonis, président du Freedom House Office à Vilnius et professeur associé à l’Université de Vilnius. « Le régime est le problème a-t-il insisté. C’est contre celui-ci que nos efforts doivent être concentrés« .

Bien qu’il ne soit ni de nationalité, ni d’ascendance biélorusse, Vytis Jurkonis est aujourd’hui un des principaux porte-voix des opposants à Loukachenko.

Aujourd’hui, la diaspora biélorusse est présente par milliers dans plusieurs pays d’Europe centrale et de la Baltique, dont la Pologne, la Lituanie, où ils sont environ 6 000, ou encore la République tchèque.

L’ONU n’a toujours pas statué sur le nombre d’agents du Hamas infiltrés dans l’UNRWA

La commission d’enquête diligentée par l’ONU, et conduite par Catherine Colonna, diplomate française et ancienne Ministre des Affaires Étrangères, n’a toujours pas confirmé le degré d’infiltration du Hamas dans l’institution onusienne dédiée aux Palestiniens, l’UNRWA (United Nations Relief and Works Agency for Refugees in the Near East, fondée en 1949).
Pourtant, Amir Weissbrod, Deputy Director of United Nations and International Organisations Division, State of Israel
c’est-à-dire le diplomate israélien chargé du dossier de l’UNRWA, en visioconférence avec la presse européenne, a expliqué le 8 avril que l’UNRWA était totalement vérolé par les agents du Hamas. « Il ne s’agit pas seulement de quelques brebis galeuses » [« not just a few bad apples »], a-t-il dit. Ce sont plus de 17% des agents UNRWA qui sont affiliés au Hamas, et un tout petit nombre au Jihad Islamique.
L’UNRWA est vérolé par le Hamas, dit Amir Weissbrod, diplomate israélien
Dans son rapport préliminaire du 20 mars, la Commission a communiqué à Israël ses éléments, et pour Weissbrod, la Commission avait fait les bonnes observations mais ne semblait en tirer aucune conclusion adéquate.
« Nous avons fourni à la Commission ce que nous avions, avec une ouverture vraiment très poussée. »
Amir Weissbrod, ambassadeur d’Israel auprès des institutions de l’ONU et des Organisations internationales
Pour comprendre l’incompréhension entre Israël et l’ONU sur ce dossier, Weissbrod fait une mise au point. Pour l’UNRWA, le question de savoir si un agent est affilié au Hamas tient aux déclarations officielles: le gouvernement de Gaza a-t-il mentionné l’appartenance de la personne au Hamas? Les cours sont-ils neutres? Y a-t-il des slogans anti-israéliens? Aussi, Israël note que plusieurs agents de l’UNRWA s’expriment sur les réseaux sociaux, et sont très évidemment des membres du Hamas. Et plus d’une trentaine de principaux d’école affiliés au Hamas travaillent à quelques dizaines de mètres de bouches de tunnels militaires du Hamas, pleinement repérables. Parfois les tunnels étaient sous les maisons de ces principaux. L’UNRWA recherche des mots, et ne fait aucune recherche sur la sécurité. Et même sur les mots, elle ferme les yeux. Toujours selon Weissbrod, Israël n’a pas de problème avec l’UNRWA hors de Gaza, c’est-à-dire que les opérations au Liban et en Jordanie ne l’intéressent pas. Et si une autre agence de l’ONU, telle l’OCHA (Office of the Commissioner on Humanitarian Assistance) voulait s’occuper de l’aide à la place de l’UNRWA, le gouvernement israélien n’y trouverait rien à redire.